Ancien rugbyman amateur devenu tétraplégique après un accident dans une mêlée, Tony Moggio s’est penché sur les blessés et les morts de son sport dans un livre.

 « Des amateurs se comparent aux pros en envoyant des énormes plaquages. Le problème, c’est que les pros sont très bien entraînés, mais eux pas toujours », affirme Tony Moggio.
« Des amateurs se comparent aux pros en envoyant des énormes plaquages. Le problème, c’est que les pros sont très bien entraînés, mais eux pas toujours », affirme Tony Moggio. DR
Par Romain Baheux

Ses jambes ne le portent plus depuis le 17 février 2010. Tétraplégique après un accident en mêlée lors d’un match à côté de Toulouse (Haute-Garonne) entre son équipe de Castelginest et Labarthe-sur-Lèze, Tony Moggio fait maintenant partager son expérience de grand blessé du rugby. Après un premier ouvrage « Talonneur brisé », l’ex-sportif amateur a publié vendredi « Les Accidents dans le rugby, ma vérité » (Privat). Un livre où il fait le tour des idées pour diminuer le nombre de blessures graves dans son sport.

Pourquoi avoir voulu parler des blessés dans le rugby après avoir déjà raconté votre accident ?

TONY MOGGIO. Après mon premier livre, j’ai reçu de nombreux messages de joueurs qui me demandaient si le rugby était devenu un sport dangereux ou de mères qui s’inquiétaient pour leur fils. Je me suis dit : Il faut qu’un grand blessé donne sa vérité. Je voulais faire un état des lieux, montrer que l’on fait des choses pour améliorer le rugby, qu’on le fait évoluer.

Avez-vous encore envie d’aller chercher du positif dans un sport qui vous a rendu tétraplégique ?

Je n’ai jamais été dégoûté par le rugby. Il m’a ôté 80 % de mon corps, mais je l’aime encore. Moi, ce qui me fait du mal, c’est de voir des joueurs gravement blessés, je sais ce qu’eux et leurs familles peuvent ressentir. C’est triste d’être lourdement handicapé ou de mourir à cause de ta passion. C’est pour ça qu’il faut se pencher sur ce qu’on peut améliorer. Le risque zéro n’existe pas, mais le but est de voir sur quoi on peut travailler.

Quelles actions vous intéressent ?

On a rencontré William Servat et Thierry Savio à Toulouse. Ils ont développé une machine, le baby scrum, pour voir l’intensité qu’un joueur est capable de mettre dans une mêlée. Avec des capteurs de puissance, vous allez voir qui a besoin de se renforcer musculairement. L’évolution des règles, avec la suppression de l’impact en mêlée, ou encore l’abaissement de la ligne du plaquage et l’interdiction du plaquage à deux, va aussi dans le bon sens. Je mentirai si je dis qu’il n’y aura plus d’accidents, mais des choses sérieuses ont été mises en place. Mais il faut aussi une plus grande prise de conscience chez les pratiquants.

Oui, mais ça n’est pas toujours facile d’imposer une préparation poussée dans des petits clubs…

Eh bien dans ce cas, on ne joue pas. Il faut savoir ce que l’on veut entre finir dans un fauteuil roulant ou pratiquer correctement son sport. Il faut sensibiliser les clubs amateurs et arrêter de prendre les choses à la légère. Parfois, je vois certains joueurs arrêtés trois semaines revenir le week-end suivant pour dépanner les copains. Ça, ça n’est plus possible.

Que dîtes-vous à des parents qui veulent inscrire leur enfant au rugby ?

Je leur dis de le faire. En revanche, il faut leur faire prendre conscience des risques. Si on les cache pour rassurer les gens, c’est comme ça qu’on ne les prend pas en compte et que l’on multiplie les situations dangereuses.