Au cours d’un match de rugby, la vie de Tony Moggio bascule dans le fracas. Face à la tétraplégie, certains auraient été anéantis. Lui, au contraire, en a fait un atout pour vivre et aimer plus fort. Un témoignage vrai et plein d’espoir.

En ce dimanche glacé de février 2010, Tony Moggio a poussé parce que le rugby c’est comme la vie, sa vie : ne pas plier même quand, en face, le tumulte a le souffle de l’adversité. Alors, Tony Moggio « a mis la tête » pour défendre son maillot jaune et bleu. Mais ce jour-là, il n’y a pas eu de troisième mi-temps. L’hélicoptère l’a emporté, brisé. « J’ai d’abord entendu le bruit lointain du rotor puis, de plus en plus distinctement, le chuintement tranchant des pales qui fauchaient l’air glacé. Dans le vacarme croissant de l’engin en approche, j’ai su que je venais de changer de vie. Je l’avais déjà deviné, mais là je l’ai compris. Définitivement. »

Son corps meurtri ne s’est jamais tout à fait remis, il se réveille privé de ses membres. Ce réveil va durer trois jours et sa tétraplégie toute une vie, il le comprend vite. « Trois jours au cours desquels une vie en devient une autre. (…) Trois jours pendant lesquels je me dis parfois que mourir ne serait pas la pire des choses. Mais j’en sors. Ces trois premiers jours ont pesé pour moi le temps d’une éternité. (…) Je suis convaincu que je dois au rugby d’avoir tenu le coup à la fois physiquement et mentalement durant ces longs jours et ces très longues nuits aux portes de l’enfer, car il n’y avait pas que le respirateur à domestiquer. Il y avait aussi ma peur. »

Ce livre raconte ce réveil et sa renaissance car il a dû renaître. « Je revenais chez les vivants mais mon corps avait fui. » Il est privé de l’usage de ses membres, et alors ? Les gestes ne sont plus les mêmes, mais l’esprit qui pousse la volonté derrière les poteaux est intact. Tony sʼest emparé des valeurs du rugby pour se reconstruire. S’il revient sur tous les détails de cette reconstruction des plus intimes aux plus difficiles à vivre, il témoigne aussi du rôle qu’a joué la grande famille du rugby. « Moi, obscur talonneur de série 2, infoutu de faire une touche droite, j’ai alors compris ce qu’était une « famille », quand on n’emploie pas ce terme dans le sens de filiation ou de parentèle. Il n’est pas ici question d’état civil mais de partage ; un sens inné de la solidarité qui s’exprime dès qu’un membre de la fratrie se retrouve dans la nécessité. »

Aujourd’hui, il témoigne de tout cela dans sa biographie et parle de sa vie toute neuve, celle du bonheur. Il a son maillot dans la tête, le ballon dans le coeur, et, son terrain, c’est désormais la joie de vivre, une vie dont il jure qu’elle ne l’a jamais abandonné. Il est plus que jamais à la conquête, et il le faire savoir au lecteur avec son livre.

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Tony Moggio, talonneur brisé  – Tony Moggio, Philippe Motta – Editions Privat – 2015 – 192 pages

Prix indicatif : 15 € .